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Margherita SALICOLA

ca 1660 – ?

dite Margherita la bella

Aussi [-Suini] [Salicoli] [Margherita di Sassonia] [Selicoli]

On sait peu de choses sur l'origine de cette remarquable cantatrice, probablement née au début des années 1660 (à Bologne ?). Ses parents sont musiciens et sa sœur Angiola l'accompagne régulièrement sur scène, même si Margherita est la plus remarquable des deux.
Sa carrière début à Modène, vers 1677 où on la repère dans Germanico sul Reno de Legrenzo avec Francesca Cottini et les castrats Origoni et Segni. Elle poursuit à Reggio (avec Segni, à nouveau) puis en 1679 à Bologne (notamment Atide de Tosi, avec De Castris). Margherita et sa sœur sont engagées pour Gênes où elle créent probablement Doriclea de Stradella.
On la retrouve à Venise en 1682, notamment dans Lisimaco riamato d'Alessandro de Legrenzi avec sa sœur ainsi que Rivani, Clementin Hader et De Castris. L'année suivante la mène à Bologne et Reggio où elle figure en tête de distribution. Sa présence est de nouveau attestée à Venise en 1683 (avec Cortona, Bovi, Ballarini...) et 1685, sans doute dans Penelope la casta de Pallivicino, et Salicola retient l'attention de l'électeur de Saxe présent dans la ville, jusqu'à devenir sa maîtresse. Mais la diva est déjà au service du duc de Mantoue, qui prend très mal qu'elle se rende à Dresde alors que l'électeur de Saxe n'a pas même sollicité la permission de lui « emprunter » la cantatrice. Ferdinando Carlo retient la famille Salicola (les parents et Angiola) et provoque le prince-électeur en duel, ce qui lui est refusé : les princes font la guerre, et non des duels ; si le duc souhaite récupérer Margherita, qu'il vienne la chercher ! Il faut la médiation de l'électeur de Bavière pour calmer la situation : la soprano est ainsi cédée à la cour de Dresde, et les apparences sont sauves.

Elle demeure un peu moins d'une dizaine d'année en Allemagne, où le détail de ses prestations est peu connu. D'abord surtout employée pour la musique de chambre, elle paraît dès 1686 dans un Alarico, et l'année suivante dans La Gerusalemme liberata. On sait qu'elle se produit à Munich en 1688, avec les castrats Hader, Cortona et Chiaravalle. Elle est à Dresde l'année suivante dans un Antiope, et suscite la convoitise de la cour de Hanovre – en vain.

La première trace d'un retour en Italie est datée de 1695 : Margherita a alors épousé Marc'Antonio Suini. Elle apparaît ainsi à Milan, et se voit courtisée par tous les théâtres du Nord de l'Italie, alors qu'elle est passée au service du duc de Parme... pour mieux rejoindre la cour de Modène en 1697. On admire la cantatrice à Reggio, notamment dans Oreste in Sparta de Pollarolo (1697) mais aussi La Caduta dei Decemviri de Ballaroti (1699) et Tito Manlio de Gianettini (1701). Salicola se produit naturellement à Modène, comme en 1697 dans Amore fra gli impossibili de Gigli, ainsi que Turin, Plaisance et sans doute Vienne.
La soprano accepte enfin de retourner à Venise – elle avait décliné maintes invitations en prétextant que l'air y était mauvais pour elle – pour la saison du carnaval 1703-04 et en 1705, chantant plusieurs opéras de F. Gasparini dont La Fredegonda. Ses partenaires ne sont pas des moindres, puisqu'elle partage l'affiche avec les castrats Pistocchi, Tempesti, ou encore Domenica Pini. En 1705, Salicola est à Florence et passe au service du duc de Toscane. Là encore, son chant ravit mais le déclin est entamé et en 1709, elle est obligé d'adresser une supplique : il semblerait qu'elle ne soit plus payée. La cantatrice finit par bénéficier d'une pension jusqu'en 1717, année probable de sa mort. Son nom glorieux encore dix ans auparavant (elle est citée dans Der Carnaval von Venedig de Keiser à Hambourg en 1707) est alors déjà oublié.

Cet oubli perdure et le nom de la Salicola est aujourd'hui inconnu, à l'instar d'autres divas de son temps comme la Tarquini, la Torri-Cecchi ou Barbara Riccioni. Son talent était absolument remarquable, et le nombre de ses employeurs prestigieux devait faire envie à plus d'une rivale. R. Celletti souligne la virtuosité de son rôle dans les partitions de Pallavicino, annonçant les prouesses techniques des années 1700. Chassebras de Cramailles, qui entend la chanteuse en 1683, en laisse le portrait suivant :
Elle passe pour une des plus belles voix d'Italie, et demeure actuellement à Bologne. Elle est blonde, de taille médiocre, a le teint fort blanc, beaucoup de brillant, une manière libre et aisée, l'air de qualité, et est bonne comédienne.
Zanetti a croqué la silhouette de la chanteuse à Venise (ci-dessus ©Fondazione Cini).

La Doriclea Doriclea A. Stradella 1681 Gênes
  Enregistrement au choix
La Gerusalemme liberata [2] Armida C. Pallavicino & Strungk 1689 Dresde
> air In amor ci vuol costanza Version adaptée. F. Lombardi Mazzulli, Pera ensemble dir. M.C. Yeşilçay – Jerusalem CD Glossa 2018
Antiope Antiope C. Pallavicino & Strungk 1689 Dresde


> air Vieni, corri
Extraits. M. Bach, Lautten Compagney Berlin dir. W. Katschner – retransmission de représentation, Dresde 2000
L. Desandre, ensemble Jupiter dir. T. Dunford – Amazone, CD Erato 2021